Sur le lieu d’amitié…

Un si petit territoire

Entre 1816 et 1919, le territoire hautement stratégique de la petite commune wallonne de Moresnet (aujourd’hui dans l’entité de Plombières, en province de Liège), par la volonté des vainqueurs de Napoléon Ier à Waterloo en 1815, fut un territoire neutre et indépendant de 3,44 km2 et de 250 habitants environ, dont la langue officielle était l’espéranto.

On y exploitait alors la mine de zinc de la Vieille Montagne (épuisée en 1885), la plus riche d’Europe, dont on a extrait plus de deux millions de tonnes en cinq siècles, et les Pays-Bas en disputaient la souveraineté à l’Allemagne. Celle-ci annexa le territoire en 1915 et le traité de Versailles établit en 1919 la souveraineté belge sur le Moresnet Neutre ainsi que sur le village allemand voisin de Neu-Moresnet. À nouveau confisquée par l’Allemagne en 1940, la commune fut définitivement restituée à la Belgique en 1944.

Sans toutefois battre monnaie, le Moresnet Neutre, qui avait pris le nom espérantiste d’Amikejo (« lieu d’amitié »), arborait son propre drapeau, avait son propre gouvernement, ses services postaux et même son hymne national, l’Amikejo Marsch. Il y a donc 98 ans que l’espéranto n’est plus la langue officielle du seul pays pour qui il le fut jamais [1].

C’est dans cet étrange pays au confluent des frontières actuelles de l’Allemagne, des Pays-Bas et de la Belgique que l’écrivain et diplomate français Marc Bressant [2] situe l’action de son roman-fleuve Un si petit territoire (publié à Paris par Bernard de Fallois), une saga passionnante qui s’étend sur tout un siècle pour s’achever avec l’entrée des troupes allemandes dans le Moresnet Neutre le 8 août 1914.

Car, écrit l’auteur, « les deux jeunes aides de camp, l’un néerlandais, l’autre prussien, à qui leurs souverains avaient confié mission de « régler au plus vite le problème de Moresnet », ne se doutaient évidemment pas qu’en créant au cœur de l’Europe un pays sans armée ni police ni justice, ils ouvraient la porte à de bien singulières aventures… »

PÉTRONE

Un si petit territoire par Marc Bressant, Paris, Éditions de Fallois, avril 2017, 414 pp. en noir et blanc au format 15,6 x 22,5 cm sous couverture brochée en couleurs, 22 € (prix France)

 

[1] Cf. Neutral-Moresnet-neutreÉchos d’une curiosité européenne par Leo Wintgens, Aachen, Helios Verlag & Montzen, Centre de recherches linguistiques Obelit, collection « Documents d’Histoire », novembre 2010, 304 pp. en quadrichromie au format 21,5 x 30,5 cm sous couverture cartonnée et jaquette en couleurs, 39,90 €.

[2] Dont l’ouvrage La Dernière Conférence a été récompensé par le grand prix du roman de l’Académie française en 2008.

Date de publication
dimanche 30 juillet 2017
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