Personnage complexe, l’écrivain et philosophe Alain de Benoist de Gentissart (né en 1943) est l’auteur d’une centaine de livres consacrés pour la plupart à la philosophie politique et à l’histoire des idées.
Titulaire des diplômes de droit constitutionnel à la faculté de droit de Paris, puis de philosophie, de sociologie et d’histoire des religions à la Sorbonne, il a frayé dans sa jeunesse avec l’extrême droite française (il rédigea en 1960 des articles dans le mensuel d’Henry Coston, Lectures françaises, et, entre 1963 et 1965, des ouvrages prônant la défense de l’Algérie française et de l’Organisation armée secrète ainsi que du régime d’apartheid en Afrique du Sud, avant de se tourner vers la philosophie politique et de participer, en 1968, à la création du Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne (GRECE), principal mouvement de la « Nouvelle Droite », de prendre en 1969 la direction de la revue Nouvelle École, de devenir éditorialiste de la revue Éléments en 1973 et de fonder Krisis en 1988, toutes choses qui lui valent une réputation des plus sulfureuses.
Pourtant, dans les colonnes de Krisis qu’il qualifie comme « de gauche, de droite, du fond des choses et du milieu du monde », il pratique l’ouverture vers plusieurs courants d’idées et penseurs extérieurs au milieu néo-droitier, comme Jean Baudrillard, Régis Debray, Jean-François Kahn ou Michel Jobert, voire engagés au sein de la gauche antilibérale, tels Bernard Langlois et Ignacio Ramonet.
En juin 1978, son livre Vu de droite (paru chez Copernic l’année précédente, republié aux Éditions Le Labyrinthe en 2001) a obtenu le grand prix de l’essai décerné par l’Académie française.
Bien que se positionnant toujours très à droite, Alain de Benoist s’est vigoureusement opposé aux considérations antimusulmanes et anti-immigration du Front national français et, depuis 1986, il préconise le soutien aux luttes pour l’autonomie des peuples du tiers monde et l’alliance avec celui-ci contre l’impérialisme, tout en affinant une pensée qui n’hésite pas à convoquer Karl Marx, Martin Heidegger, Gustave Le Bon ou Friedrich Nietzsche en approfondissant des thèmes aussi divers que le paganisme, l’immigration, les races, les racismes et les identités, l’antiaméricanisme, la construction européenne, la lutte contre le néolibéralisme, l’écologie, la philosophie politique ou encore l’histoire. [1]
Il a fait paraître à Monaco, aux Éditions du Rocher, Ce que penser veut dire – Penser avec Goethe, Heidegger, Rousseau, Schmitt, Péguy, Arendt… un essai tout à la fois original, profond et politiquement incorrect qui juxtapose des synthèses de la pensée d’un nombre considérable de philosophes pour en tirer une Weltanschauung qui à nos yeux ne manque pas d’intérêt, même si nous ne la partageons pas.
Voici la présentation qu’en donne l’auteur :
« « Penser à » n’est pas la même chose que penser tout court. La tâche de l’historien des idées consiste à étudier et à faire connaître l’œuvre de ceux qui ont proposé diverses grilles d’interprétation, diverses façons de voir et de comprendre le monde, révélant ainsi ce que penser veut dire. À l’époque moderne, Rousseau s’est efforcé de penser la nature de l’homme et l’origine de la société, Cari Schmitt la nature du politique, Karl Marx l’essence du capitalisme.
Sigmund Freud et Carl Jung ont tenté de jeter les bases d’une psychologie des profondeurs, Gustave Le Bon s’est penché sur la psychologie des foules, Jules Monnerot a analysé le phénomène totalitaire, Michel Villey a entrepris de révéler la véritable nature du droit.
C’est l’œuvre de ces penseurs et de bien d’autres, de Heidegger à Arthur Koestler, de Goethe à Georges Sorel, de Nietzsche à Montherlant, de Leo Strauss à Jean Baudrillard, de Charles Péguy à Hannah Arendt, de Denis de Rougemont à Julien Freund, qui est présentée de façon vivante et pédagogique dans ce livre.
Tous ces auteurs attestent que le travail de la pensée a joué un rôle décisif dans l’histoire, entraînant des mutations bien différentes des révolutions bruyantes, des grandes explosions que tout le monde connaît, mais qui sont restées sans lendemain.
« Les révolutions silencieuses sont les plus efficaces », disait Jünger. Ce sont peut-être aussi les plus passionnantes. »
Un livre qui déplaira aux tenants de la pensée unique…
Et qui a donc beaucoup pour nous plaire !
PÉTRONE
Ce que penser veut dire – Penser avec Goethe, Heidegger, Rousseau, Schmitt, Péguy, Arendt… par Alain de Benoist, Monaco, Éditions du Rocher, avril 2017, 375 pp. en noir et blanc au format 14 x 22,5 cm sous couverture brochée en couleurs, 19,90 € (prix France)
TABLE DES MATIÈRES
Sommaire
Avant-propos
JEAN-JACQUES ROUSSEAU (1712-1778)
Un révolutionnaire conservateur
JOHANN WOLFGANG VON GOETHE (1749-1832)
Le pari faustien
LES ROMANTIQUES ALLEMANDS
L’âme des peuples
KARL MARX (1818-1883)
Le fétichisme de la marchandise
GUSTAVE LE BON (1841-1931)
La psychologie des peuples
SIGMUND FREUD (1856-1939)
La découverte de l’inconscient
CARL GUSTAV JUNG (1875-1961)
Le monde des archétypes
CARL SCHMITT (1888-1985)
La dialectique de l’ami et de l’ennemi
MARTIN HEIDEGGER (1889-1976)
Nihilisme et métaphysique de la subjectivité
EMMANUEL BERL (1892-1976)
Un homme de gauche de droite
HENRY DE MONTHERLANT(l895-1972)
L’alternance et la hauteur
ERNST JÜNGER (1895-1998)
L’Anarque face au règne des Titans
LEO STRAUSS (1899-1973)
Athènes et Jérusalem
BERTRAND DE JOUVENEL (1903-1987)
Un « passeur » transversal
KONRAD LORENZ (1903-1989)
L’homme est par nature un être de culture
ARTHUR KOESTLER (1905-1983)
Contre le réductionnisme
HANNAH ARENDT (1906-1975)
La déréliction existentielle de l’homme moderne
DENIS DE ROUGEMONT (1906-1985)
Le fédéralisme intégral
RAYMOND ABELLIO (1907-1986)
Un « homme du souterrain »
JULES MONNEROT (1909-1995)
Les totalitarismes comme religions séculières
JACQUELINE DE ROMILLY (1913-2010)
L’héritage grec
MICHEL VILLEY (1914-1988)
La généalogie du droit
JULIEN FREUND (1921-1993)
L’essence du politique
JEAN CAU (1925-1993)
Une conception solaire de la vie
JEAN BAUDRILLARD (1929-2007)
La disparition du réel
JEAN-CLAUDE MICHÉA (né en 1950)
De l’utilité du regard en arrière
TROIS ENTRETIENS :
– FRIEDRICH NIETZSCHE (1844-1900)
La pensée de l’Éternel Retour
– GEORGES SOREL (1847-1922)
Le syndicalisme révolutionnaire
– CHARLES PÉGUY (1873-1914)
Mystique et politique