Wallonie, terre d’accueil

Nous ne saurions trop recommander la lecture ô combien instructive d’un remarquable essai traduit du néerlandais et intitulé Migrants flamands en Wallonie, 1850-2000. Il a paru aux Éditions Racine à Bruxelles à l’occasion de l’exposition éponyme conçue par le KADOC (Centre de documentation et de recherche : religion – culture – société de la KU Leuven), placée sous la houlette des historiens Idesbald Goddeeris et Roeland Hermans et présentée au Grand-Hornu Images du 18 mars au 27 mai 2012, à la demande du Président et des membres du Collège de la Province du Hainaut.

La version originale de l’ouvrage constitue quant à elle le numéro 26 de la série « Bijdragen Museum van de Vlaamse Sociale Strijd » de la Province de Flandre-Orientale, publié à l’occasion de l’exposition « Vlaamse migranten in Wallonië, 1850-2000 » organisée par le même KADOC-KU Leuven au Provinciaal Cultuurcentrum Caermersklooster de Gand entre avril et juin 2011.

On y apprend qu’au cours des cent cinquante dernières années, poussés par la pauvreté voire la misère, des centaines de milliers de Flamands ont émigré en Wallonie et y ont fait souche.

C’étaient des agriculteurs, des mineurs ou des ouvriers… Si certains rentraient chaque semaine chez eux et si d’autres séjournaient en Wallonie pour la saison des récoltes, beaucoup se sont établis définitivement – et souvent avec bien des difficultés – dans la partie méridionale de la Belgique.

Écoutons Claude Durieux, actuel gouverneur de la Province du Hainaut .

« Les traces laissées depuis la moitié du XIXe siècle par l’immigration flamande en Wallonie sont si nombreuses que nous ne les relevons même plus. Elles se sont fondues dans le paysage et ont coloré nos patronymes. De la même manière, nous avons tendance à oublier les réalités – souvent douloureuses – auxquelles elles renvoient. Si nous avons encore conscience du quotidien pénible, par exemple, des milliers d’immigrés italiens ou polonais qui fuirent la misère pour grossir les contingents d’hommes et de femmes engagés dans l’industrie alors prospère du sud de notre pays, il est peut-être judicieux de nous rappeler que nos voisins du nord connurent parfois un destin semblable. À l’heure où la Belgique traverse l’un des moments les plus difficiles de son histoire, la Province de Hainaut, en collaboration avec la Province de Flandre-Orientale, a choisi de faire œuvre de mémoire et d’éclairer ce temps où les Flamands quittaient les campagnes du plat pays, non pour rechercher la richesse, mais pour échapper à la pauvreté.

Ayant travaillé au fond des mines, dans la métallurgie, l’industrie verrière et l’agriculture, ils ont participé à la vie culturelle et associative wallonne, ont créé des associations, de petits commerces et ont formé de véritables quartiers au sein de communes telles que La Louvière, Liège ou Gilly. Certains sont repartis, d’autres sont restés, ont fondé une famille. Leurs descendants ne se souviennent pas toujours du destin hors du commun de leurs aïeux, des sacrifices auxquels ils ont consenti et de leur apport à la fois tangible et symbolique au cœur de la réalité wallonne. »

Dans cet ouvrage, des historiens et des spécialistes comme Guido Fonteyn, Henk Byls, Franck Caestecker, Luc Vandeweyer, Mathias Cheyns, Yves Segers, Koen Verbruggen, Yves Quairiaux ou Anne Morelli, entre autres, se sont penchés sur ce phénomène, ont déchiffré les mouvements migratoires et analysé les processus d’établissement. Ils ont étudié le rôle mobilisateur de l’Église et du mouvement flamand ou encore envisagé la migration flamande en Wallonie dans un contexte plus large. Outre des analyses scientifiques, le livre présente des témoignages d’émigrés flamands et l’ensemble est illustré par de nombreuses photographies inédites.

Un livre à méditer longuement, de part et d’autre de la frontière linguistique !

PÉTRONE

Migrants flamands en Wallonie 1850-2000 sous la direction d’Idesbald Goodderis & Roeland Hermans, photographies de Layla Aerts, Bruxelles, Éditions Racine, collection « Campus », mars 2012, 248 pp. en quadrichromie au format 21 x 26 cm sous couverture brochée en couleurs et à rabats, 29,99 €

Date de publication
lundi 9 juillet 2012
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