Rebond…

Récit d’une résilience écrit dans l’urgence et inspiré de sa propre histoire, le premier roman de la psychologue belge Amélie Dieudonné (°1990), La chute, cette belle envolée publié chez L’Harmattan à Paris marche dans les pas d’Elia, vingt-six ans, son double, dont la vie souriante s’effondre comme un château de cartes avec le surgissement de difficultés professionnelles, l’accident de moto de son compagnon, l’apathie de celui-ci, leur séparation, la descente aux enfers, la lutte pour survivre, les contradictions internes, la thérapie et enfin le retour sur terre.

Extrait :

« Rien n’a évolué jusqu’à aujourd’hui.

Ils ont listé tous les objets de l’appartement. Toi les couverts, moi les verres, toi la bouilloire, moi le grille-pain. Ils pleurent, rient. La tendresse réapparaît par bribes. Ils s’aiment profondément, tendrement. L’amour            amical et fraternel ressurgit. Ils s’enlacent, leurs yeux parlent pour eux, complètent les mots qu’ils ne peuvent se dire. L’humour les sauve, les unit dans la séparation. Ils prennent soin d’eux, décident de profiter de ces instants ensemble, repasser des moments comme ils ont adoré en passer. Elle ferme ses caisses, il monte son nouveau lit. Ils cuisinent leur repas préféré, passent la soirée serrés l’un contre l’autre.

Rien n’a évolué jusqu’à aujourd’hui. Le 2 avril.

Le camion de déménagement arrive dans dix minutes. Elia est complètement instable. Ses épaules s’affaissent de soulagement à chaque caisse de plus qui s’en va. Enfin. L’air recircule petit à petit dans sa poitrine. Elle a hâte de sa nouvelle vie, trépigne d’impatience. Elle s’imagine déjà redécorer l’appartement, l’investir à sa façon. Elle a soif de vie, remplie d’idées. Faire enfin tout ce qu’elle a mis sur le côté depuis huit ans.

Et puis elle pleure, ne veut pas le voir partir, est terrorisée. La séparation devient réelle, prend forme et elle ne peut pas l’accepter. Il est tout pour elle. Elle a l’impression de perdre sa moitié. Un demi-visage, un bras, une jambe, un poumon. Elle panique, se sent démembrée, vidée, qui est-elle sans lui. Huit ans qu’ils sont Greg et Elia. Elle ne peut pas le laisser partir, c’est impossible.

Le camion est rempli, l’appartement vide. Il s’en va. Elle danse de joie, se noie dans ses larmes.

Elle réserve un billet de train pour Paris, tiraillée et perdue. »

La vie comme elle (ne) va (pas), en somme…

PÉTRONE

La chute, cette belle envolée par Amélie Dieudonné, Paris, Éditions L’Harmattan, collection « Rue des Écoles Littérature », septembre 2019, 126 pp. en noir et blanc au format 13,6 x 21,7 cm sous couverture brochée en couleurs, 14,50 € (Prix France)

Date de publication
samedi 12 octobre 2019
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