Sacré Charlemagne…

Proclamé docteur ès lettres en 1997 à l’Université de la Sorbonne Paris IV, Philippe Depreux (°1967) est un historien français, spécialiste du haut Moyen Âge.

D’abord maître de conférences à l’Université de Tours en 1998, il fut ensuite chargé d’étude à la MHFA (Mission Historique Française en Allemagne) entre 2003 et 2006. Il a obtenu l’habilitation à diriger des recherches à l’université Paris I en 2005, fut professeur de 2006 à 2013 à l’Université de Limoges, et dirigea en même temps l’Institut de Recherche des Sciences de l’Homme et de la Société dans cette université. Depuis 2013, il est professeur à l’Université de Hambourg, l’une des principales universités d’Allemagne, où il dirige la nouvelle édition des modèles d’actes et de lettres (formulae) du haut Moyen Âge. Il est membre ordinaire de l’Académie des Sciences de Hambourg.

Aux Editions Les Belles Lettres à Paris, il publie Gouverner l’Empire en Occident – Des Carolingiens au règne de de Conrad II (737-1039). Symbolisme du pouvoir et pratiques sociales, un essai bellement illustré qui décrypte les us et le fonctionnement de l’exercice du pouvoir politique sommital en Occident latin avant et après l’accession de Charlemagne (ca 742-814), roi des Francs à partir de 768, roi des Lombards par conquête en 774, au titre d’empereur Auguste couronné à Rome en décembre 800 par le pape Léon III (ca 750-816) relevant une dignité disparue en Occident depuis la déposition, trois siècles auparavant, en 476, de Romulus Augustule[1].

D’emblée, Philippe Depreux se demande quel pouvait être l’intérêt autre que celui du prestige d’avoir un empereur alors que les rois jouaient encore un rôle fondamental et, par conséquent, si la notion d’Etat indépendant de la personne physique du souverain a prévalu dans la démarche impériale carolingienne, notamment après la tripartition territoriale consécutive de la mort de Charlemagne[2].

De l’essor des Pippinides[3] jusqu’à la mort de Conrad II le Salique, né vers 990 et mort le 4 juin 1039 à Utrecht, l’auteur expose l’idéologie, la symbolique, les ambitions, les pratiques sociales et les limites de l’exercice du pouvoir impérial en le comparant à celui des rois et en abordant des thèmes très divers – du décorum des plaids généraux[4] à la pratique de la chasse ou de la genèse du sceau représentant le souverain « en majesté » à la volonté de conduire l’ensemble du peuple au paradis –, qu’il compare avec d’autres espaces politiques et culturels, dont les mondes byzantin et islamique, en combinant d’une manière originale les sources textuelles, iconographiques, artistiques et matérielles.

Éblouissant !

Bernard DELCORD

Gouverner l’Empire en Occident – Des Carolingiens au règne de de Conrad II (737-1039). Symbolisme du pouvoir et pratiques sociales par Philippe Depreux, Paris, Éditions Les Belles Lettres, octobre 2025, 322 pp. en quadrichromie au format 13,5 x 21,5 cm sous couverture brochée en couleurs, 21 € (prix France)

TABLE DES MATIERES

Introduction

Chapitre liminaire – L’empire et l’Empire

• Prémices d’Empire : les Francs et l’évêque de Rome au VIIIe siècle

• Léon III et Charlemagne, de Paderborn à Rome (799-800/801)

• L’imperium, une évidence – l’Empire, une nécessité ?

PREMIERE PARTIE

PARVENIR AU POUVOIR ET MANIFESTER SA PREEMINENCE

Chapitre I – « Couronné par Dieu » – justification du pouvoir et liturgie

• Sacre et stabilité dynastique

• Élection et couronnement

• L’envers de l’intronisation : abdication et déposition

Chapitre II – Splendeur de l’Empire et protection divine : les symboles du pouvoir

• Victoire et baraka

• Le trône et les insignes du pouvoir

• Les métamorphoses du sceau : l’affirmation progressive de la majesté

• La monnaie, instrument de propagande

Chapitre III – Voir et être vu : les rituels du pouvoir

• La chevauchée

• La chasse

• L’étiquette

DEUXIEME PARTIE

L’AUTORITE DE L’EMPEREUR

Chapitre IV – Un nouvel Empire romain ?

• Le pape, consécrateur de l’empereur

• La protection de Rome et le contrôle de l’Italie

• L’Occident et Byzance

• Normes nouvelles, droit ancien et coutume

Chapitre V – L’Empire, une puissance universelle ?

• L’empereur, roi de plusieurs royaumes ?

• Relations diplomatiques et stratégies matrimoniales

• Les marges de l’Empire et l’hommage des nations

TROISIEME PARTIE

L’EXERCICE DU POUVOIR

Chapitre VI – Gouvernement des Hommes et direction des âmes

• Convertir et soumettre à la foi orthodoxe

• L’idéal du pouvoir – ou le prince en son miroir

• L’exercice de la justice

• L’appartenance à la communauté politique

Chapitre VII – L’administration de l’Empire

• Les palais et l’affirmation de l’emprise du roi sur le territoire

• La cour impériale et les élites aristocratiques

• L’écrit, instrument de pouvoir

• L’administration des territoires : entre centralisation et régionalisme

• Les limites du pouvoir : critique, contestation et révolte

Conclusion

Notes

Sources et bibliographie

Index des noms de lieux

Index des noms de personnes

Liste des illustrations


[1] Romulus Augustule, né vers 461 et mort après 476, est la dernière personnalité proclamée empereur romain d’Occident, pour un règne qui dura à peine dix mois du 31 octobre 475 au 4 septembre 476, date de sa déposition par le général romain Odoacre (né vers 433 et mort assassiné le 16 mars 493 à Ravenne) qui mit ainsi fin à l’Empire romain d’Occident (285-476).

[2] Se conformant à la coutume successorale franque, Charlemagne avait prévu dès 806 le partage de l’Empire entre ses trois fils. Après de nombreuses péripéties, il ne fut finalement partagé (en trois royaumes) qu’en 843 entre trois de ses petits-fils, lors du traité de Verdun, l’un des principaux actes fondateurs de ce qui deviendra la France et l’Allemagne.

[3] Les Pippinides sont les membres d’une dynastie de la noblesse franque d’Austrasie dont plusieurs se nommèrent Pépin. Le terme désigne au sens strict les membres de la famille de Pépin de Landen en ligne agnatique, c’est-à-dire issus de ce dernier par les hommes. La puissance acquise par Pépin de Herstal ajoutée à son héritage maternel fut à l’origine de l’accession à la royauté de sa descendance avec Pépin le Bref (714-768) en 751, celui-ci étant le fils de Charles Martel (ca 688-741) et le père de Charlemagne.

[4] Les plaids généraux, également appelés « plaids » ou « plaids de printemps », avaient leurs origines dans l’époque mérovingienne. Ils étaient alors des réunions où tous les hommes libres étaient convoqués pour débattre de questions importantes. Sous les Carolingiens, ces assemblées ont été restreintes aux notables laïques et ecclésiastiques, et elles ont été convoquées par le roi pour discuter des projets de gouvernement et des lois à adopter. (Source : Wikipédia)

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Date de publication
mardi 28 octobre 2025
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