Le français tel qu’on le parle… chez certains pédagogues

© Muséum de Toulouse

Les résultats peu flatteurs de l’enseignement francophone aux différents tests internationaux du type PISA ont mis en évidence le grand écart entre le niveau de nos meilleurs établissements et celui des plus défavorisés d’entre eux ainsi que la grande faiblesse en langue française de beaucoup d’élèves. Fort heureusement, depuis plusieurs années, des recyclages de qualité sont proposés (voire imposés) aux enseignants concernés. Leur parfaite adéquation aux réalités de terrain explique leur remarquable efficacité.

C’est ainsi que, lors d’un cycle de formations sur les socles de compétences, pour lutter contre une certaine tendance à l’assoupissement inhérente au sujet évoqué, quelques enseignants ont eu la curiosité de s’attacher davantage à la forme des exposés qu’à leur fond. Il faut dire que le vocabulaire utilisé était particulièrement étonnant et totalement éloigné de leur pratique pédagogique en milieu socialement démuni. Ils se sont dès lors amusés à noter, en deux colonnes, les plus marquants des termes et expressions utilisés et leur traduction en langage courant.

Quelques exemples ainsi recueillis : ne dites plus « l’élève apprend », mais dites « l’enseigné s’approprie des savoirs ». Ne dites p1us « l’enseignement technique et professionnel » mais « le qualifiant », « expliquer les raisons » mais « donner du sens ». À propos des matières à enseigner, « boucler le programme » devient « respecter l’exhaustivité des référentiels de compétences », en respecter les détails se traduit par « correspondre au canevas du tiers-objet ». La meilleure : « sonder la nappe phréatique cognitive » au lieu de « vérifier les connaissances de base ».

Dans une société où la « technicienne de surface » a remplacé la femme de ménage, il est urgent que l’enseignement montre l’exemple. Dans cette perspective, voici ce que pourrait être à l’avenir le contenu d’une directive courante concernant, par exemple, l’élaboration des questions d’examens. Précisons que toutes les expressions utilisées proviennent de manière rigoureusement authentique de ces formations performantes.

NE DITES PLUS

À propos des examens
Tant dans l’enseignement général que dans l’enseignement technique et professionnel, il importe dorénavant de tenir compte de la lutte contre l’échec dans la rédaction des questionnaires d’examens. Pour que tous les enseignants travaillent de la même manière, il est nécessaire d’organiser des réunions, avant et après les sessions. Cela doit permettre, par le dialogue, en partant de ce qui existe, des expériences de chacun et de l’avis de l’inspection, d’étudier les rapports entre les collègues concernés sans négliger les remises en question ni attendre l’accord de tous sur chacun des points évoqués.
Pour éviter de se traduire par une perte de temps, la réunion doit être dirigée par une personne mandatée et bénéficier d’un secrétaire. Son but principal doit être de rédiger pour chaque branche des questions permettant de contrôler les connaissances des élèves, de vérifier leurs compétences, d’éviter les questions trop difficiles, peu claires ou ne respectant pas le programme (en supposant que chacun ait bouclé celui-ci).
L’organisation pratique des examens devra également être envisagée : déterminer l’horaire, le matériel dont l’élève pourra disposer, les exemples donnés en introduction aux exercices demandés, l’utilisation éventuelle de réponses par oui ou par non…
Cette réflexion commune permettra de créer les conditions favorables à une bonne évaluation et de répondre valablement aux questions des élèves et de leurs parents sur le sujet… dans un langage compris par tous !
MAIS DITES…

À propos des questionnements périodiques

Tant dans les sections propédeutiques que dans le qualifiant, il importe dorénavant de situer les épreuves-étalons standardisantes dans l’optique de l’école de la réussite. Pour prévenir une trop grande diversification des pratiques, il est nécessaire d’organiser des scènes de pilotage par jeu de rôles en amont et en aval. Cela doit permettre, dans un sens dialectique, en partant du déjà-là, des divers ressentis et de l’avis des conseillers disciplinaires, de faire l’analyse transactionnelle des pratiques sans négliger l’auto évaluation ni attendre une adhésion partenariale à tous les items.


Afin d’éviter de se résumer à un french meeting, la mise en commun devra être ritualisée par une personne au positionnement institutionnel clair et bénéficier d’un porte-plume. Sa cible première doit être d’élaborer des matrices de questionnement par discipline permettant de sonder la nappe phréatique cognitive des enseignés, de vérifier l’appropriation des outils, d’éviter les tendances élitistes, les questions fermées ou ne correspondant pas au canevas du tiers-objet (en supposant que chacun ait respecté l’exhaustivité des référentiels de compétences).
L’organisation pratique des épreuves étalons devra également être envisagée : baliser les biorythmes, déterminer les portefeuilles de documents autorisés, les métaphores introductives aux situations problèmes, la pratique alternative de la logique binaire…
Cette mise en intervision des interlocuteurs permettra d’ériger un environnement facilitateur donnant du sens à l’évaluation et de réagir verbalement au questionnement des apprenants ou de leurs géniteurs… dans une expression langagière familière à tous les protagonistes !

MAGISTER

Date de publication
samedi 12 mars 2011
Entrez un mot clef :