Un livre à la taille du sujet qu’il traite…

Prix Médicis de l’essai en 2012, Congo Une histoire de l’historien flamand David Van Reybrouck (titulaire d’un doctorat de l’université de Leyde après des études à Leuven et à Cambridge, il est né à Bruges en 1971) est une œuvre atypique dont le rayonnement – immense – tant en français qu’en néerlandais et en anglais ne laisse pas de laisser pantois.

Comme l’explique l’éditeur, ce livre est l’histoire fidèle, rigoureuse, éminemment documentée et absolument romanesque de la RDC. L’histoire d’un peuple, d’une nation, d’un fleuve sur lequel s’aventurèrent Stanley et les premiers marchands d’esclaves, les envoyés du roi Léopold II, et ceux venus tracer les lignes frontalières de cette immensité géographique. David Van Reybrouck y retrace le destin tumultueux de ce pays, de la préhistoire à nos jours.

De la colonisation à l’indépendance, il entremêle les faits historiques et le récit de ses rencontres, et son livre prend alors une dimension très personnelle où l’empathie à l’égard de ses interlocuteurs est fondamentale. Parmi ces figures généreuses, le lecteur se souviendra de ces anciens qui content au jeune Belge des aventures extraordinaires remontant jusqu’à l’époque précoloniale. Alternant passages explicatifs et narratifs, David Van Reybrouck prend tour à tour sa plume d’historien, de romancier, de journaliste et d’auteur de théâtre – quatre « territoires » d’écriture – qu’il travaille avec virtuosité, passant de l’ample rigueur d’une Histoire du Congo à la sensibilité littéraire d’un grand récit de voyageur : une construction qui donne à ce livre son rythme, sa vivacité, sa singularité.

Au fil du temps, il rencontre des acteurs essentiels des débuts de l’indépendance, de l’ère Mobutu et des guerres qui ont éprouvé le pays depuis l’arrivée au pouvoir des Kabila, il retrouve des victimes et des bourreaux – tel ce seigneur de guerre au Kivu – qui se confient à lui et offrent des témoignages inédits où le tragique le dispute à un comique féroce. Mais Congo, une histoire est aussi un hymne jubilatoire à la vitalité de tout un peuple, à sa créativité musicale et artistique, à sa capacité de survie dans une économie de la débrouillardise qui, en l’absence de structures, se mondialise naturellement : alors que s’installe déjà une population chinoise venue exploiter les richesses du sous-sol, certains importateurs congolais vont aujourd’hui se fournir à Guangzhou.

Le XXIe siècle sera peut-être – et nous l’espérons – celui de l’âge d’or de ce pays si attachant…

Paru à l’occasion du cinquantenaire de l’indépendance du Congo, ce grand livre a valu à son auteur, en sus du Médicis de l’essai 2012, le prix Ako (le Goncourt belgo-néerlandais). Véritable best-seller dans l’idiome de Vondel (plus de 300 000 exemplaires vendus), il a été traduit dans de nombreuses langues. Cet engouement international résulte sans aucun doute du fait que nous avons tous en Europe un passé colonial et que l’histoire du Congo est le symbole même de la mainmise européenne sur l’Afrique, de ses succès, de ses excès, de ses échecs et des conséquences brûlantes de nos récentes interventions sur le continent noir.

Un ouvrage à dévorer toutes affaires cessantes !

PÉTRONE

Congo Une histoire par David Van Reybrouck, traduit du néerlandais par Isabelle Rosselin, Arles, Éditions Actes Sud, collection « Lettres néerlandaises », septembre 2012, 711 pp. en noir et blanc au format 14,5 x 24 cm sous couverture brochée en couleurs, 28 € (prix France)

Date de publication
mercredi 21 novembre 2012
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