« La gueule de bois est la colère des raisins. » (Tristan Bernard)

Auteur d’ouvrages mêlant érudition, sens du baroque et humour énorme à l’instar de celui de Rabelais, l’écrivain français Orlando de Rudder (1950-2015) a connu un parcours de vie fort surprenant.

Né en 1950, dans un train à destination de Rome, il se fit donner son prénom de baptême par le pape Pie XII. Puis sa mère, cantatrice, l’abandonna. Il suivit alors son père – grand critique gastronomique, l’un des fondateurs du fameux guide Gault et Millau, qui épousa la fille de la musicienne Germaine Taillefferre, musicienne du Groupe des Six[1]. Après leur divorce, à quatorze ans, Orlando se retrouva seul à Paris, vécut dans un foyer d’éducation surveillée et découvrit avec excitation le pavé parisien de 1968.

Il a roulé dans la Delage de Boris Vian et l’Aston Martin de Roger Nimier, il a assisté aux dérives canularesques d’Albert Vidalie et d’Antoine Blondin, il a connu l’humour et la gentillesse de Jean Tardieu. Philippe Soupault lui faisait des grimaces et lui parlait de l’enfer et, à huit ans, il reçut son premier stylo à encre, offert par Julien Gracq.

Docteur ès-Lettres, il n’abandonna pas son sens de l’humour. Professeur de linguistique médiévale et de guitare, boxeur, il a notamment rédigé un livret d’opéra sur François Villon, un Dictionnaire des Onomatopées et un très documenté Bréviaire de la gueule de bois paru en 1993 et réédité en 2014 sous le titre Manuel de la gueule de bois [2].

Les Éditions Flammarion le ressortent cette année (dans la collection de poche « Librio ») à l’occasion des fêtes de Noël et de la Saint-Sylvestre, un service qu’elles rendent à prix d’ami (3 euros) aux fêtards réels ou virtuels, reclus ou non du fait de la pandémie de Covid-19, cette calamité qui n’en finit pas de saper le moral de tout un chacun, en ce compris les abstinents les plus coriaces.

C’est là un petit essai à la fois savant, amusant et même philosophique, s’agissant des réflexions de l’auteur sur l’ivresse, et qui fournit au passage des remèdes à la « casquette de plomb » consécutive de fortes libations : aspirine, omelette aux truffes, sabayon, bicarbonate de soude, eau salée, tisanes, jus de fruits, vin de rhubarbe et végétaux divers.

Mais aussi, pour combattre le mal par le mal, qui conseille le Picon pur, le rince-cochon, le Fernet-Branca, le Bloody Mary, un Oyster cocktail, de l’Underberg ou de la liqueur d’angélique…

Il y en a pour tous les (dé)goûts !

PÉTRONE

Manuel de la gueule de bois –Avant, pendant, après par Orlando de Rudder, Paris, Éditions Flammarion, collection « Librio », novembre 2021 [1993, 2014], 92 pp. en noir et blanc au format 13 x 20,5 cm sous couverture brochée en couleurs, 3 € (prix France)

TABLE

Introduction. Préface et paratonnerre

1. Mode d’emploi de cet ouvrage. Sources

2. Recommandations

3. Plan de l’ouvrage

4. De la « méthode » et du renoncement provisoire à l’expérience

5. Plan et justification de la seconde partie

6. Choisir son ivresse

Première partie

1. Avant de boire

Talismans

Préventions de l’ivresse

2. En buvant

Ne pas être à jeun

3. Après avoir bu un peu, ou beaucoup, mais pas encore passionnément

4. Lorsque le mal est fait

Remèdes divers

Préparations et classement des plantes, graines, écorces utiles pour diverses préparations

L’alcool contre alcool ou similia similibus curantur

Cocktails et liqueurs

Liqueurs et apéritifs divers à préparer soi-même

Médecines et pharmacie

Alcalins, amers et acides

Vomitifs

Deuxième partie

1. L’alcoolisme

Le discours antialcoolique : rhétoriques et témoignages

Alcoolisme occasionnel, alcoolisme habituel

Trois formes principales

Les étapes de l’alcoolisme

Omniprésence de l’alcool

Alcoolémie et automobile

Effets de l’alcool sur le cerveau

2. L’alcool

Fermentation et distillation

Psychotrope et tranquillisant

L’alcool est indigeste

Diverses substances contenues dans les boissons fortes

Nocivité

Doses

Anesthésie

Anaphrodisiaque

3. Mythes et symboles

Khôl

L’eau-de-vie, l’eau-de-feu

Une conception de l’existence

Reptiles, insectes, arthropodes

4. De l’ivresse

L’ivresse

De son bon usage

Attention aux discours antialcooliques

L’abstinence

Les infortunes de la vertu

Toutefois, cependant, néanmoins

De l’obligation à la réprobation

Initiation

Beuverie

Soûleries

Conclusion

Bibliographie

Index


[1] Le groupe des Six, aussi nommé Les Six, est un groupe de compositeurs réunissant, entre 1916 et 1923, Georges Auric (1899-1983), Louis Durey (1888-1979), Arthur Honegger (1892-1955), Darius Milhaud (1892-1974), Francis Poulenc (1899-1963), et Germaine Tailleferre (1892-1983). Leur musique réagissait essentiellement contre l’impressionnisme et le wagnérisme. Ils étaient très influencés par les idées d’Erik Satie et de Jean Cocteau. (Wikipédia)

[2] Source : Orlando de Rudder – Babelio

Date de publication
samedi 25 décembre 2021
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