« Il n’y a pas de rose de 100 jours. » (Proverbe chinois)

Écrivain belge de renommée internationale, Simon Leys, nom de plume de Pierre Ryckmans, né le 28 septembre 1935 à Uccle (Région de Bruxelles-Capitale) et mort le 11 août 2014 à Sydney, était un écrivain, essayiste, critique littéraire, traducteur, historien de l’art, sinologue et professeur d’université de langue française et anglaise et de confession catholique.

Il était le fils d’un éditeur, le petit-fils d’Alphonse Ryckmans, homme politique conservateur, conseiller communal d’Anvers puis vice-président du Sénat, le neveu de Pierre Ryckmans, gouverneur général du Congo belge et du Ruanda-Urundi de 1934 à 1946, et de Gonzague Ryckmans, professeur à l’Université de Louvain et sommité mondiale de l’épigraphie arabique.

Doté d’un grand talent littéraire, ce brillantissime spécialiste de l’histoire, de la langue et de la culture chinoises s’est fait connaître en 1971 par son pamphlet Les Habits neufs du président Mao, qui fit scandale parce qu’il dénonçait avec autant de vigueur que de lucidité et de brio les dérives du maoïsme et de sa « révolution culturelle » (1966-1976) alors particulièrement en vogue auprès de l’intelligentzia mondaine parisienne[1], qui ne le lui pardonna pas.

Grand voyageur devant l’Éternel, Simon Leys, après ses humanités gréco-latines au collège diocésain Cardinal Mercier de Braine-l’Alleud, se rendit en Chine en 1955 – il avait alors 19 ans – pour un séjour encadré au cours duquel il prit part à un entretien avec Zhou Enlai (1898-1976), le numéro 2 chinois, avant de bourlinguer en Afrique, à Taiwan (il y étudia à la section des Beaux-Arts de l’Université nationale), de rouler sa bosse au Japon, de traverser les États-Unis en bus de la société Greyhound, de rentrer en Belgique pour y terminer son mémoire de fin d’études en histoire de l’art, d’aller enseigner en chinois à l’université de Nanyang (Singapour) et de s’installer à Hong Kong en 1963, où il rédigea tous les quinze jours, de 1967 à 1969, un rapport analysant le déroulement des événements en Chine, pour le compte de la délégation diplomatique belge[2].

En 1972, il occupa pendant 6 mois le poste d’attaché culturel de l’ambassade de Belgique à Pékin, aux côtés du diplomate Patrick Nothomb (1936-2020), père de l’autrice Amélie Nothomb (°1966).

La thèse de doctorat de Simon Leys, défendue haut la main, traduit et commente un chef-d’œuvre de l’histoire de l’art chinois, le traité de peinture écrit par Shitao, dont le nom se traduit par Citrouille-amère, véritable génie créatif du début du XVIIIsiècle. Elle sera publiée, en 1970, par l’Institut belge des hautes études chinoises à Bruxelles, sous le titre Propos sur la peinture du moine Citrouille-amère. Contribution à l’étude terminologique des théories chinoises de la peinture.

Les portes de l’Université française lui ayant été fermées par un quarteron de sinologues catho-maoïstes[3], Simon Leys gagna l’Australie en 1972 pour y enseigner au sein des universités de Canberra, puis de Sydney.

Simon Leys fut membre de l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique (de 1990 à 2014) et du Collège de Pataphysique à Paris.

Les Habits neufs du président Mao (1971) fut suivi d’Ombres chinoises (1974) et par Images brisées (1976).

Les Belles Lettres à Paris republient le second volet de cette trilogie, Ombres chinoises, dans la collection « Le Goût de l’Histoire » dirigée par Jean-Claude Zylberstein, offrant ainsi au lecteur curieux une bonne occasion de mieux comprendre nombre d’éléments sous-jacents à l’exercice du pouvoir tel qu’il est encore détenu aujourd’hui à Pékin par Xi Jinping (°1953).

Le journaliste et écrivain français Pierre Boncenne (°1950) décrit Ombres chinoises comme un « habile patchwork, analyses et choses vues ou entendues, anecdotes sur la vie quotidienne, évocation littéraire, données économiques, intermède sur les moyens de transport, compte rendu d’un banquet diplomatique, listes d’ouvrages en librairie, exemples de programmes scolaires, visites de sites, propos politiques, conversation à bâton rompus, portraits de gens de la rue et du Parti… »

Une sorte de prolongement politique d’Un Barbare en Chine (1933), récit pérégrin d’une autre grande plume belge, le poète Henri Michaux (1899-1984)…

PÉTRONE

Ombres chinoises par Simon Leys, préface de Jean-François Revel, nouvelle édition augmentée, Paris, Éditions Les Belles Lettres, collection « Le Goût de l’Histoire » dirigée par Jean-Claude Zylberstein, janvier 2025 [1974, 1978], 353 pp. en noir et blanc au format 12,5 x 19 cm sous couverture brochée en couleurs, 15,90 € (prix France)

TABLE DES MATIÈRES

Préface, par Jean-François Revel

Avant-propos

1. Les étrangers en Chine populaire

2. Suivez le guide

3. Petit intermède hagiographique

4. Petit intermède philosophique.

5. Bureaucrates

6. Vie culturelle

7. Universités

8. Bâtons rompus

Postface à la réédition de 1978

Épilogue : L’après-maoïsme

I. Mao Tse-tung et l’histoire de Chine

II. Notes de lecture : Camarade Chiang Ch’ing, par Roxane Witke

III. « Chinois, encore un effort pour être révolutionnaires ! »

Petite bibliographie commentée


[1] À l’instar des membres de la revue Tel Quel, dont Philippe Sollers (1936-2023) qui fit son mea culpa trente ans plus tard.

[2]) Ces rapports seront à l’origine de son livre Les Habits neufs du président Mao dans lequel il soutient que la révolution culturelle chinoise fut un coup politique lancé par Zhou Enlai et Mao Zedong afin de reprendre le contrôle de l’État, qu’ils avaient perdu. Le titre est une référence au conte de l’écrivain danois Hans Christian Andersen (1805-1875), Les Habits neufs de l’empereur (1837) dans lequel sont dénoncés la sottise et la veulerie des courtisans d’un roi.

[3] Jean Chesneaux (1922-2007, ex-secrétaire de la Paroisse étudiante, président de Greenpeace France de 1997 à 2004), Yves Hervouet (1921-1999, un ancien apprenti jésuite qui a contribué à la création de l’université de Vincennes où il fut nommé professeur de chinois en 1969), Jean-Luc Domenach (né en 1945, proche d’une revue chrétienne de grande diffusion, Esprit) et Léon Vandermeersch (1928-2021, prosélyte de Lin Biao dans les pages de cette même revue, dont les articles sur la Chine étaient « à hennir de rire », selon Simon Leys). (Sources : Wikipédia.)

Date de publication
lundi 27 janvier 2025
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