« Le duché qui voulait être empire » (revue Hérodote)

Auteur du best-seller Les Téméraires – Quand la Bourgogne défiait l’Europe[1] paru en 2020 chez Flammarion à Paris et qui ressort en version de poche collector dans la collection « Champs histoire » dans la même maison, l’écrivain belge francophile de langue néerlandaise Bart Van Loo (°Herentals, 1973) est un érudit d’envergure et un conteur captivant, à l’instar de l’historien et polémiste bourguignon Henri Guillemin (1903-1992), écrivions-nous à la sortie de son impressionnante biographie de Napoléon[2].

La preuve en est administrée dans sa façon bluffante d’y narrer l’histoire des ducs de Bourgogne présentée comme une grande aventure militaire, politique, diplomatique, économique et artistique oscillant entre féerie médiévale et luttes implacables.

L’histoire d’une famille régnante qui, en passant par Bruxelles, Gand, Bruges, Anvers, Namur, Tournai, Lille, Besançon ou encore Luxembourg, a jalonné les routes de la Scandinavie des Burgondes jusqu’à Dijon, la capitale du duché octroyé en 1363 par le roi de France Jean II le Bon à son fils Philippe, qui en prit possession le 2 juin 1364, devenant alors Philippe II de Bourgogne (dit « Philippe le Hardi ») et initiant la maison de Valois-Bourgogne.

Ses successeurs, Jean Ier de Bourgogne (1371-1419), dit « Jean sans Peur », Philippe III de Bourgogne (1396-1467), dit « Philippe le Bon », Charles Ier de Bourgogne (1433-1477), dit « Charles le Téméraire » et Marie de Bourgogne (1457-1482) instaurèrent peu à peu l’« État bourguignon », constitué d’un ensemble de principautés féodales regroupant le duché de Bourgogne (fief français), le comté de Bourgogne (fief d’Empire) et plusieurs fiefs des Pays-Bas, notamment le comté de Flandre (fief français) et le duché de Brabant (fief d’Empire), détenus par le chef de la maison de Valois-Bourgogne.

Les ducs de Bourgogne du XVsiècle divisaient couramment leurs possessions en deux ensembles : les Pays de par-deçà (fiefs des Pays-Bas) et les Pays de par-delà (fiefs de Bourgogne), dont le duché de Bourgogne et la ville de Dijon constituaient l’élément principal

L’ensemble de l’État bourguignon était organisé autour du duc de Bourgogne, dont la cour était itinérante et qui résidait aussi bien aux Pays-Bas que dans les pays de Bourgogne, voire dans le royaume de France.

Aussitôt après la mort de Charles le Téméraire en janvier 1477, le roi de France Louis XI lança son armée contre les États bourguignons, dévolus à une Marie de Bourgogne, duchesse âgée de 20 ans et non mariée.

Ce fut le début de la guerre de Succession de Bourgogne (1477-1482). Dès janvier 1477, l’armée française occupa le duché de Bourgogne, puis envahit le comté, qui devint le principal théâtre d’opérations.

Marie de Bourgogne, confrontée à cette menace, ainsi qu’à la rébellion de ses sujets des Pays-Bas bourguignons, notamment flamands (Bruges, Gand, etc.), à qui elle dut concéder le Grand Privilège (en avril 1477), épousa Maximilien d’Autriche au mois d’août.

En 1493, le traité de Senlis mit fin au conflit entre la France et les Habsbourg : la possession de la Bourgogne et de la Picardie par le roi de France était confirmée, les autres fiefs de la maison de Bourgogne restant la propriété des héritiers de Marie de Bourgogne et Maximilien.

En 1515, Charles de Habsbourg, petit-fils de Marie de Bourgogne et Maximilien, fut reconnu comme duc de Bourgogne, souverain des Pays-Bas bourguignons, par les États généraux.

En 1516, il devint régent de Castille et d’Aragon (pour sa mère, incapable), puis roi consort des deux royaumes et de leurs possessions.

Enfin, en 1519, il devient chef de la maison de Habsbourg et en 1520, il se fit élire empereur contre les candidatures de François Ier et d’Henri VIII.

Par Marco Zanoli[3]

Né à Gand dans les Pays-Bas bourguignons, Charles Quint (1500-1558)[4] reçut une éducation en langue française, se considéra avant tout comme un chevalier bourguignon, héritier de la dynastie de Valois-Bourgogne, notamment de Charles le Téméraire, et tenait la France comme son ennemi principal, notamment pour avoir indûment confisqué le duché de Bourgogne.

Son attachement au duché perdu se manifesta à la fin de la sixième guerre d’Italie qu’il mena de 1520 à 1526 contre François Ier, achevée par le désastre français de Pavie (février 1525).

François Ier, prisonnier en Espagne, dut alors signer le traité de Madrid (janvier 1526) qui incluait la restitution du duché de Bourgogne à l’héritier de Charles le Téméraire.

Libéré, François Ier fit casser le traité par le Parlement de Paris, ce qui impliqua la reprise de la guerre. Mais cette fois, le résultat fut moins favorable à Charles Quint et le conflit s’acheva avec le traité de Cambrai (dit de la « paix des Dames »), selon lequel le duché de Bourgogne restait à la France.

C’en était fini du rêve des Valois-Bourgogne…

Saluons le brio de Bart Van Loo qui fait revivre avec passion ces grands ducs aussi audacieux qu’ambitieux, dont la puissance et la splendeur firent l’admiration et l’envie de toute l’Europe, et surtout de Paris.

À leur apogée, ils voyageaient de Mâcon à Amsterdam sans passer une seule frontière.

Ils unifièrent d’immenses territoires, dont la partie septentrionale devint le berceau de la Belgique et des Pays-Bas.

De cette époque glorieuse, il reste désormais les témoignages d’artistes de génie.

Parmi ceux-ci, on retiendra le sculpteur Claus Sluter (ca 1355-1406) dont l’œuvre novatrice a durablement influencé la sculpture gothique internationale de son temps.

Rogier Van der Weyden

Le Jugement dernier (entre 1443 et 1452)

Huile sur bois, Hospices de Beaune[5].

Ou le peintre Rogier de Le Pasture dit Rogier Van der Weyden (1399 ou 1400-1464), l’artiste tournaisien à qui l’on doit notamment l’extraordinaire Jugement dernier (entre 1443 et 1452), un polyptique en quinze panneaux visible aux hospices de Beaune.

Les époux Arnolfini

Par Jan Van Eyck[6]

Ainsi que Jan Van Eyck (ca 1390-1441), dont les tableaux les plus connus sont Les Époux Arnolfini (1434) et La Vierge du chancelier Rolin (1435).

Retable de l’Agneau mystique par Hubert et Jan Van Eyck

Huile sur bois, 350 x 461 cm

(Cathédrale Saint-Bavon de Gand)[7]

Il acheva par ailleurs le fameux retable de L’Agneau mystique de la cathédrale Saint-Bavon à Gand, commencé par son frère Hubert van Eyck (ca 1366-1426) et terminé en 1432[8].

De purs joyaux de l’art médiéval occidental !

PÉTRONE

Les Téméraires – Quand la Bourgogne défiait l’Europe par Bart Van Loo, ouvrage traduit du néerlandais par Daniel Cunin et Isabelle Rosselin, Paris, Éditions Flammarion, collection « Champs histoire », octobre 2023, 924 pp. en noir et blanc au format 10,9 x 17,7 cm sous couverture brochée en couleurs et à rabats, 15 € (prix France)

TABLE DES MATIÈRES

Arbres généalogiques et familles royales

Cartes

Avertissement des traducteurs

Prologue

I. Le millénaire oublié

De Royaume à duché

De la Bourgogne à la Flandre

II. Le siècle bourguignon

Sortis de la boue

La ville sans peur

1789 avant la lettre

Les Plats Pays en herbe

La France, cheval de trait de la Bourgogne

Beauté et folie

Ostentation et propagande

Assassinat et combat linguistique

Amours arrangées, tumulte incontrôlable

Poing coupé, teste toute écartelée

Trois comtés, un seul duc

Le combat pour la Hollande et la Zélande

Comme femelle ou comme masle

Apparat et paillettes

La fosse ou le bûcher

Paix et beauté

Le rêve bourguignon

Faisan et renard

Pères et fils

III. La décennie fatale

Joyeuse entrée, sombre accueil

La couronne à portée de main

Rénovation et innovation

Piégé dans la neige

IV. Une année décisive

V. Un jour mémorable

Épilogue. Le dernier Bourguignon

Annexes

Chronologie

Personnages historiques

Bibliographie

Remerciements

Index


[1] De Bourgondiërs. Aartsvaders van de Lage Landen sorti en 2019.

[2] Napoléon – L’ombre de la Révolution, Paris, Éditions Flammarion, collection « Au fil de l’histoire », octobre 2023, 581 pp. en noir et blanc + 32 pp. en quadrichromie au format 15,2 x 24 cm sous couverture brochée en couleurs et à rabats, 29 € (prix France)

[3] CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=31413459

[4] Charles de Habsbourg, né le 24 février 1500 à Gand (comté de Flandre) et mort le 21 septembre 1558 au monastère de Yuste (Espagne), élu en 1520 empereur sous le nom de Charles V, couramment en français Charles Quint, fils de Philippe le Beau et de Jeanne la Folle, héritier par son père des possessions de la maison de Habsbourg (royaume de Hongrie, royaume de Bohême, archiduché d’Autriche, etc.) ainsi que des dix-sept provinces des Pays-Bas et de la Franche-Comté, par sa mère des royaumes de Castille et d’Aragon (sous le nom de Charles Ier) et de l’empire colonial espagnol, ainsi que du royaume de Naples (Charles II), fut le monarque européen le plus puissant de la première moitié du XVIsiècle.

[5] Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=160204

[6] Web site of National Gallery, London, Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=11343084

[7] Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=109213

[8] Sources : Wikipédia.

Date de publication
samedi 25 novembre 2023
Entrez un mot clef :