Sexe fort…

Rédigé par cinq éminents médiévistes flamands, l’essai consacré à La femme dans la cité au Moyen Âge (Bruxelles, Éditions Racine) est proprement révolutionnaire.

Par sa méthodologie, d’abord : la mise en lumière, en regard des écrits de Christine de Pizan[1], de documents essentiellement du XVsiècle pas ou peu exploités en provenance du duché de Brabant et de la seigneurie de Malines ainsi que de Maastricht, ville dépendant tout à la fois du duc de Brabant et du prince-évêque de Liège (actes de registre échevinal, jugements de banc des échevins, écrits sur la vie quotidienne, journaux intimes, livres de comptes, actes de vente, testaments, dépositions devant un tribunal, amendes infligées, rapports de témoins…)

Par son ciblage, ensuite : les sources traitant du rôle dans la société urbaine[2] de femmes de la classe moyenne aux activités variées (épouses, marchandes entrepreneures, apprenties artisanes, mères de famille, béguines pieuses et moins pieuses, bâilleuses de fonds, tenancières de bordel, criminelles et même émeutières), à l’inverse de celles qu’exploitèrent Georges Duby[3] et Jacques Le Goff[4] dans leurs écrits fameux.

Par ses conclusions, enfin : dans les Pays-Bas méridionaux (Belgique, Luxembourg et Nord de la France), les femmes avaient en réalité de nombreux droits qu’elles utilisaient pour commercer, exprimer leurs opinions ou faire respecter leur volonté.

Loin des idées toutes faites…

PÉTRONE

La femme dans la cité au Moyen Âge par Jelle Haemers, Andrea Bardyn et Chanelle Delameillieure avec la collaboration de Kim Overlaet et Nena Vandeweerdt, ouvrage traduit du néerlandais par Arthur Chimkovitch et Marieke Van Acker, Bruxelles, Éditions Racine, août 2022, 256 pp. en noir et blanc au format 16 x 24,5 cm sous couverture brochée en couleurs, 24,95 €


[1] Christine de Pizan, née en 1364 à Venise et morte vers 1430 à Poissy, était une philosophe et poétesse d’origine vénitienne, célèbre pour ses écrits rédigés en français. Veuve et démunie, elle dut gagner sa vie en écrivant et elle est considérée comme la première femme de lettres de langue française ayant vécu de sa plume. Son érudition la distingue des écrivains de son époque, hommes ou femmes. C’est une auteure prolifique qui a composé des traités de politique, de philosophie et des recueils de poésies. Elle s’est retirée dans un couvent à la fin de sa vie, où elle a écrit un Ditié de Jeanne d’Arc. On lui doit, entre autres, Cent ballades d’amant et de dame et La Cité des dames. L’essentiel de son travail fut accompli entre 1400 et 1418. (Source : Wikipédia.)

[2] Les sources traitant des femmes de la classe moyenne rurale sont quasi inexistantes.

[3] in Mâle Moyen Âge (1988) dans lequel il écrivait : « Ce Moyen Âge est mâle, résolument. Car tous les propos qui me parviennent et me renseignent sont tenus par des hommes, convaincus de la supériorité de leur sexe ».

[4] in Hommes et femmes du Moyen Âge qui traite dans sa version princeps de 105 personnages illustres dont seulement 17 femmes.

Date de publication
samedi 26 novembre 2022
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