Née en 1907 dans le Montana, élevée en Californie et atteinte de poliomyélite, Dorothy Baker (née Dodds) a épousé le poète Howard Baker en 1930 après avoir décroché à l’Université de Californie de Los Angeles (UCLA) une licence de français en 1929, puis une maîtrise en 1933. Elle fit scandale à Broadway avec l’adaptation de son roman Trio (1943) qui met en scène l’homosexualité féminine et fut très vite retiré de l’affiche. En 1962, elle publia Cassandra au mariage sur le thème de la gémellité avant, en 1968, de s’éteindre d’un cancer à Terra Bella en Californie.
En 1938, elle avait fait paraître Le jeune homme à la trompette, largement considéré comme le premier roman sur le jazz et devenu instantanément un classique. Dorothy Baker s’y est inspirée de l’art et de la vie du légendaire cornettiste américain blanc fasciné par la musique de ses compatriotes de couleur, Bix Beiderbecke (1903-1931).
Le roman a été adapté en 1950 dans un film à succès avec Kirk Douglas (1916-2020), Lauren Bacall (1924-2014) et Doris Day (1922-2019) sous son titre originel Young Man with a Horn (devenu en français « La Femme aux chimères »).
On connaît la passion pour le jazz éprouvée par l’éditeur français Jean-Claude Zylberstein (°1938) qui, dans la collection « Domaine étranger » qu’il dirige aux Éditions Les Belles Lettres à Paris, a intégré Le jeune homme à la trompette dans sa forme traduite par le fameux écrivain, trompettiste de jazz, ingénieur, poète, parolier, chanteur, critique musical et directeur artistique français Boris Vian (1920-1959) pour la revue Jazz Hot entre 1948 et 1949.
Pitch :
« Le roman suit la vie de Rick Martin, un jeune orphelin de Los Angeles, qui découvre sa passion pour la musique et la trompette. Doté d’un talent exceptionnel, il se fait rapidement un nom dans le monde du jazz des années 1920. Rick est fasciné par la musique afro-américaine et fréquente des clubs de jazz, où il se produit et perfectionne son art. Cependant, sa quête de succès est entravée par des problèmes personnels, notamment des excès d’alcool et des relations conjugales tumultueuses. »[1]
Incipit :
« Ce que je m’en vais faire, c’est raconter la vie de Rick Martin, maintenant que tout est fini, maintenant que Rick est mort – qu’il s’en est allé, comme on dit, trouver le vrai repos.
L’histoire elle-même, dans ses lignes essentielles, ce n’est pas grand-chose. Rick naquit en Géorgie cinq ou dix minutes avant que sa mère ne meure, et à peu près dix jours avant que son père ne fasse ses valises pour le planter là, lui, sa tante âgée de dix-sept ans et le frère de celle-ci. Ces deux-là, à force de travail, étaient à Los Angeles huit ans plus tard, avec Rick ; c’est là qu’il grandit, comme il devait grandir, il faut croire. Il apprit le piano en tripotant des pianos dans les églises et dans les cabarets – en fait, partout où il pouvait dénicher un piano et jouer. Et du fait qu’il avait, jusque dans ses os, tout ce qu’il faut pour faire un musicien, il devint, encore tout gosse, un fameux pianiste. Mais le piano, ce n’était pas exactement ce qui lui convenait – et à la fin, il s’attaqua aux cuivres ; il gagna assez d’argent pour s’acheter un cornet. Et puis il apprit à jouer du cornet – de la trompette, pour ceux, s’il y en a, qui ne savent pas de quel genre de cornet je veux parler – et, ça, c’était ce qu’il lui fallait. Il apprit beaucoup de Art Hazard, le grand trompette noir, mais ça ne suffit pas à expliquer pourquoi il était si formidable. »[2]
« Rick Martin aimait la musique et la musique l’aimait. Il pouvait apprendre un air si rapidement que le patron du Cotton Club se moquait bien de savoir qu’il était mineur, ou les membres du groupe qu’il n’était qu’un gamin blanc. Il a commencé dans les bas-fonds de Los Angeles sans rien, et a fini au sommet dans les bars clandestins et les boîtes de nuit de New York. Mais si le talent et la volonté suffisent pour réussir dans la musique, ils ne suffisent pas pour réussir sa vie. »[3]
Hélas…
PÉTRONE
Le jeune homme à la trompette par Dorothy Baker, ouvrage traduit de l’anglais par Boris Vian, Paris, Éditions Les Belles Lettres, collection « Domaine étranger » dirigée par Jean-Claude Zylberstein, septembre 2025 [1982], 212 pp. en noir et blanc au format 12,5 x 19 cm sous couverture brochée en couleurs, 13,90 € (prix France)
[1] https://www.bing.com.
[2] Page 11.
[3] Dany de Ribas, attachée de presse, Éditions Les Belles Lettres.