Le mouvement perpétuel

couverture du livre "on n'arrête pas la connerie".

Le recueil intitulé On n’arrête pas la connerie paru tout récemment au Cherche midi à Paris constitue l’intégrale des textes, répliques et pensées de Jean Yanne (1933-2003), agrémentée de nombreux inédits, une véritable somme de réflexions vachardes sur les soubassements, les élévations et les fioritures de la nature humaine. Car durant toute sa vie et de son propre aveu, cet humoriste provocateur, ce cinéaste délirant et cet acteur de génie a été captivé par la connerie, qu’il trouvait plus fascinante que l’intelligence, parce que sans limites. Véritable entomologiste de la bêtise qu’il débusquait jusque dans ses manifestations les plus anodines, il a compilé ses observations dans des formules qui, pour être lapidaires, n’en sont pas moins des abîmes de réflexion sur les pauvres de nous.

Florilège : « Tout le monde veut sauver la planète, mais personne ne veut descendre les poubelles » ; « Aujourd’hui, le poisson est considéré comme pourri dès qu’il sent le poisson, et la viande comme avariée dès qu’elle sent la viande » ; « L’amour est aveugle… La preuve ? En le faisant, il y a des gens qui braillent » ; « Les moutons ont quand même cet avantage sur l’homme qu’on les conduit à l’abattoir sans leur parler patriotisme ou promesse d’un monde meilleur » ; « Dieu a enlevé une côte à Adam pour créer Ève, et Ève a fait manger de la pomme à Adam… C’est fou, ça, on ne donne pas à manger à quelqu’un qui vient d’être opéré ! » ; « Si les triangles avaient un Dieu, il aurait trois côtés » et « Si Dieu a fait l’homme à son image, il est moche ! »…

Il avait par ailleurs une façon assez particulière de répondre aux questions des journalistes : « Comment voyez-vous la France depuis les États-Unis [où il résidait] ? Désolé, on ne voit pas la France de là-bas » ; « Que pensez-vous des programmes scolaires ? On progresse : on arrivera bientôt à Marignan 1514,78 ! » ; « Quand vous mourrez, que voulez-vous emporter dans votre cercueil ? Un deuxième costume, on ne sait jamais ! » ; « Quelle est votre vision du monde ? Celle d’un proctologue doublé d’un peintre abstrait »…

On le voit, notre homme était un joyeux anarchiste (il inventa même en 1968 sur RTL le fameux slogan « Il est interdit d’interdire »…), ce qu’avait d’ailleurs parfaitement compris l’écrivain Gilles Durieux, qui lui consacra en 2005 une remarquable biographie sous le titre Jean Yanne : ni dieu ni maître (même nageur)

PÉTRONE

On n’arrête pas la connerie par Jean Yanne, préface d’Olivier de Kersauzon, Paris, Éditions Le cherche midi, collection « Les Pensées », avril 2010, 486 pp. en noir et blanc au format 16 x 20 cm sous couverture brochée en couleur, 18,50 € (prix France)

Date de publication
mercredi 1 septembre 2010
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