Conceptions grotesques d’un peintre raté…

À l’aube de la Seconde Guerre mondiale, les autorités nazies qualifient plusieurs œuvres d’art moderne présentes dans les musées allemands de « dégénérées » et souhaitent les liquider.

Il s’agit de productions « marquées par – ou conduisant à – la perte des qualités aryennes. Sont d’abord visés les apports d’artistes d’origine juive, “bolcheviques” (engagés peu ou prou “à gauche”) ou “cosmopolites”. L’expressionnisme et ses confins (postimpressionnisme, fauvisme, cubisme) sont les principaux ennemis à abattre. Leur sont reprochés un parti pris formel “irréaliste”, fruit d’une vision “malade”, voire “débile”, un primitivisme “négroïde”, une thématique étrangère aux stéréotypes de la culture nazie, vouée à l’exaltation de la famille, de la virilité et des vertus guerrières, ainsi que, de manière plus implicite, mais sans doute plus fondamentale, le privilège accordé à la subjectivité, en opposition radicale à la primauté du collectif que postule toute idéologie totalitaire » (Jean-Patrick Duchesne, dans le catalogue de l’exposition).

Le 30 juin 1939, la très réputée Galerie Fischer organise une vente aux enchères historique, au Grand Hôtel National à Lucerne, de 108 peintures et 17 sculptures de 39 artistes sélectionnées au sein des musées allemands. Elle réunit des noms parmi les plus grands : Paul Gauguin, Vincent Van Gogh, Marc Chagall, James Ensor, Henri Matisse, Georges Braque, André Derain, Maurice De Vlaminck, Amedeo Modigliani, Oskar Kokoschka, Otto Dix, George Grosz, Paul Klee, August Macke, Marie Laurencin ou encore Pablo Picasso…

L’État belge est présent à la vente, de même qu’une délégation liégeoise qui a réuni de gros moyens. La Belgique acquiert plusieurs œuvres pour les musées d’Anvers et de Bruxelles tandis que Liège achète neuf toiles exceptionnelles [1] qui font actuellement partie des œuvres majeures des collections de la Ville.

C’est autour de ce noyau que s’organise l’exposition « L’art dégénéré selon Hitler » présentée jusqu’au 29 mars 2015 au sein de la Cité Miroir à Liège, un événement qui, pour la première fois, réunit une grande part des œuvres vendues à Lucerne et sont aujourd’hui dispersées à travers le monde dans des collections privées et publiques, quand elles n’ont pas été détruites ou n’ont pas disparu durant la guerre.

L’exposition est en outre étoffée par divers documents évoquant le contexte historique de la vente.

INFOS PRATIQUES

Date(s) :

Jusqu’au dimanche 29 mars 2015 – 18h00.

Horaires :

Du lundi au vendredi, de 9h à 18h

Samedi et dimanche, de 10h à 18h

Dernière entrée pour l’exposition : 17h – Vestiaire obligatoire

Nocturne : mercredi 25 mars – dernière entrée à 20h

Lieu :

La Cité Miroir – Espace Georges Truffaut

Place Xavier Neujean, 22 – 4000 Liège

Tél. +32 (0)4 230 70 50

info@citemiroir.be

Tarifs :

Groupe (min. 10 pers.) : 8 €

Individuel adulte : 12 €

Groupe scolaire : 5 €

Article 27 : 1,25 €

Moins de 14 ans : gratuit

Possibilité de visites guidées via l’asbl Art&Fact :

http://www.artfact.ulg.ac.be/visite-guidee-exposition-art-degenere-selon-hitler-cite-miroir.php#infopra

La visite de cette exposition donne librement accès à l’exposition « Notre Combat », à l’exposition « Les Achats de Paris » au BAL, à l’exposition « Artistes dégénérés » de la Galerie Wittert et à une entrée pour le Grand Curtius.

Le catalogue – il est magnifique –, édité par le commissaire de l’exposition Jean-Patrick Duchesne aux Collections artistiques de l’Université de Liège, est en vente à la librairie de La Cité Miroir (2e étage) au prix de 30€.

Contact librairie :

Tél. 04/250.99.59

Table des matières :

– Lucerne, le 30 juin 1939. Des tableaux « d’art dégénéré » pour Liège et la Belgique (par Jean-Patrick Duchesne)

– Vente de Lucerne : un choix dans « l’art dégénéré » (par Yves Dubois)

– Étude technique et matérielle des tableaux liégeois (par Catherine Defeyt et David Strivay)

– Les achats de Paris (par Christelle Schoonbroodt)

– Paysage artistique d’une ville de province. Esquisse sur l’état de la peinture et du goût à Liège dans l’entre-deux-guerres (par Yves Randaxhe)

– De la vente de Lucerne à l’affaire Picasso. Points de vue actuels (par Julie Bawin)

– L’architecture moderne à Liège dans les années 1930 (par Sébastien Charlier)

– Chagall, Ensor, de Vlaminck, Laurencin : artistes « dégénérés » aux Collections artistiques de l’Université de Liège (par Stéphanie Reynders)

– Catalogue des œuvres vendues par la Galerie Fischer à Lucerne le 30 juin 1939

PÉTRONE

L’art dégénéré selon Hitler – La vente de Lucerne, 1939, ouvrage édité par Jean-Patrick Duchesne, Liège, Collections artistiques de l’Université de Liège, octobre 2014, 231 pp. en quadrichromie au format 21 x 27 cm sous couverture brochée en couleurs, 30


[1] La Mort et les Masques (1897) par James Ensor, La famille Soler (1903) par Pablo Picasso, Le cavalier sur la plage (1904) par Max Liebermann, Chevaux au pâturage (1910) par Franz Marc, Le sorcier d’Hiva Oa ou Le Marquisien à la cape rouge (1920) par Paul Gauguin, La maison bleue (1920) par Marc Chagall, Le Déjeuner (1923) par Jules Pascin, Portrait de jeune fille (1924) par Marie Laurencin et Monte-Carlo (1925) par Oskar Kokoschka.

Date de publication
dimanche 8 mars 2015
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