Jacques Paviot (°1955), docteur de l’université Paris IV-Sorbonne (1993) habilité à diriger des recherches (2000), professeur émérite d’histoire médiévale à l’Université Paris-Est Créteil, a publié de très nombreux ouvrages sur le Moyen Âge[1] et plusieurs études sur les contacts entre Européens et Mongols.
Dans Gengis Khan et l’empire mongol XIIe-XV siècle,publié aux Éditions du Cerf à Paris, il raconte l’épopée de Gengis Khan, l’enfant proscrit devenu le « conquérant du monde », un guerrier sans pitié et un stratège visionnaire qui a refaçonné l’Asie et qui fut à l’origine du plus vaste empire jamais vu et dont il raconte aussi l’histoire.
Temüjin Borjigin, dit Gengis Khan, né vers 1155 ou 1162 en Mongolie, et mort en 1227 en Chine, fonda l’Empire mongol.
Temüjin était l’aîné des enfants d’un chef mongol. À l’âge de huit ans, il perdit ce père et sa famille fut abandonnée par sa tribu. Après une jeunesse réduite à la pauvreté, il s’associa à deux puissants chefs des steppes, Djamuqa (ca 1162-1205) et Toghril (ca 1130-1203), qui l’aidèrent à enlever, pour l’épouser, sa future femme Börte.
En 1187, un conflit éclata avec Djamuqa, et Temüjin fut défait. On pense qu’il pourrait alors avoir été un sujet de la dynastie Jin[2] avant de revenir sur la scène politique mongole en 1196.
En 1203, il affronta ses deux anciens alliés. Après avoir vaincu les Naïmans, des Mongols turcophones, il soumit Toghril et exécuta Djamuqa, devenant ainsi le dernier khan[3] de la steppe mongole.
En 1206, lors d’un qurultay (assemblée exécutive formée de notables et de militaires), Temüjin prit le titre de Gengis Khan.
En 1209, il entreprit d’envahir la Chine, en se lançant à la conquête des Xia occidentaux, qui acceptèrent de se soumettre l’année suivante. Il mena ensuite une campagne contre la dynastie Jin qui se termina en 1215 par la prise de Zhongdu (Pékin), et son général Djebé (1181-1225) annexa les Kara-Khitans[4] en 1218.
En 1219, Gengis Khan soumit l’Empire khwarazien[5] par une invasion qui dévasta les grandes villes de Transoxiane[6] et du Grand Khorasan[7], tandis que ses généraux Djebé et Subötai (ca 1175-1248) atteignaient la Géorgie et la Rus’ de Kiev[8].
Gengis Khan mourut en 1227, tandis qu’il combattait des Xia occidentaux rebelles.
Son fils Tolui (ca 1191-1232) assura la régence durant un interrègne de deux ans, jusqu’à ce que le troisième fils de Gengis Khan, Ögödei (ca 1186-1291), accède au trône en 1229.
À la fin de son règne, Gengis Khan contrôlait une grande partie de l’Asie, avec la Mongolie, la Chine du Nord et la Sogdiane[9].
Après sa mort, l’empire fut considérablement agrandi par ses successeurs, et il formera à son apogée l’un des plus vastes de l’histoire, estimé à environ 23,5 millions de km2 en 1272, sous le règne du petit-fils de Gengis Khan, Qubilaï Khan (1215-1294). Celui-ci devint le premier empereur de la dynastie Yuan (1271-1368) en Chine.
Depuis les premières campagnes du fondateur de l’empire jusqu’aux derniers feux de la Horde d’or[10], le page-turner de Jacques Paviot raconte avec verve et érudition plus de trois siècles d’invasions et de sièges, de massacres et de pillages, l’épopée d’un empire hors norme dont les armées, parties de la steppe, auront déferlé jusqu’aux confins du monde, trois siècles au cours desquels les grands khans que furent les descendants de Gengis Khan, Ögödei, Möngke (1209-1259), Hülegü (ca 1217-1265) et Qubilai, ont étendu leur domination de la Terre sainte à la Corée et de l’Inde à la Pologne.
Ajoutons que Gengis Khan est de nos jours une personnalité historique controversée.
Les Mongols le considèrent comme le père de leur nation et une figure légendaire, auréolée de respect et déifiée à titre posthume. Mais son armée fut également responsable de millions de victimes et de destructions dans de nombreuses régions d’Asie, de Russie et du monde arabe, où il est perçu comme un conquérant impitoyable et sanguinaire.
Exhumant les rapports des chroniqueurs, des missionnaires, des marchands, Jacques Paviot dévoile aussi la réalité d’un territoire structuré au commerce florissant dans lequel les hommes, les idées, les croyances ont pu circuler comme jamais auparavant.
Captivant !
PÉTRONE
Gengis Khan et l’empire mongol XIIe-XV siècle par Jacques Paviot, Paris, Éditions du Cerf, octobre 2025, 324 pp. en noir et blanc au format 15 x 23 cm sous couverture brochée en couleurs, 24,90 € (prix France)
TABLE DES MATIÈRES
Introduction
1. Temüjin Qan, le vengeur (1)
2. Temüjin Qan, le vengeur (1I)
3. Temüjin, souverain des Mongols
4. Le signeur de la steppe
5. Le début de la conquête de la Chine
6. La grande campagne de l’Ouest
7. Campagne contre les Tangoutes. Mort de Gengis Khan
8. Les successeurs de Gengis Khan
L’héritage de Gengis Khan
Les successeurs de Gengis Khan
9. Les Mongols à la conquête du monde, d’Ögödei à Möngke
L’armée mongole
La conquête du Koryo (Corée)
La fin de la conquête de l’empire Jin
La conquête de l’empire Song
Les invasions de l’Inde
La conquête du Moyen-Orient
La conquête du Qipchaq et de l’Europe
10. Les nations mongoles après 1260
Les Hordes occidentales : Horde d’or et Horde bleue (1227-XVIe siècle)
L’il-khanat d’Iran (1260-1335)
L’empire mongol du Milieu : les ulus de Chaghadai et d’Ögödei (mi-XIIIe–XVe siècles)
La dynastie Yuan (1260-1368)
11. les envoyés religieux entre Europe latine et empire mongol
Conclusion
DOCUMENTS
1. Zhao Gong, Mengda beilu
2. Lettre du maître du Temple en France Pons d’Albon au roi de France Louis IX sur les événements d’Europe centrale (1241)
3. Partie autobiographique de la Plainte misérable sur la destruction de la Hongrie de Roger de Torre Maggiore (1242)
4. Relation, écrite par un tiers, de Benoît de Pologne, compagnon de Jean de Plan Carpin (1248)
Bibliographie indicative
[1] La politique navale des ducs de Bourgogne 1384-1482 (1995), Portugal et Bourgogne au XVe siècle 1384-1482 (1995), Guerre, pouvoir et noblesse au Moyen Âge. Mélanges en l’honneur de Philippe Contamine (dir. avec Jacques Verger, 2000), Bruges, 1300-1500 (2002), Les ducs de Bourgogne, la croisade et l’Orient (fin XIVe siècle-XVe siècle) (2003), Projets de croisade v. 1290 -v. 1330 (2008), Philippe de Mézières, « Une Epistre lamentable et consolatoire », adressée en 1397 à Philippe le Hardi, duc de Bourgogne, sur la défaite de Nicopolis e1396 (avec Philippe Contamine et avec la collaboration de Céline Van Hoorebeeck, 2008), Bertrandon de La Broquère, Le Voyage d’Orient (intr. et notes de Jacques Paviot, trad. d’Hélène Basso, 2010), La Cour du Prince. Cour de France, cours d’Europe, XIIe -XVe siècle (dir. Avec Murielle Gaude-Ferragu et Bruno Laurioux 2011), Hommes, cultures et sociétés à la fin du Moyen Âge. Liber discipulorum en l’honneur de Philippe Contamine (dir. avec Patrick Gilli, 2012), Les Projets de croisade. Géostratégie et diplomatie européenne du XIVe au XVIIe siècle (dir. avec Daniel Baloup et Benoît Joudiou, 2014), Le Rouleau d’Arenberg. Une histoire généalogique de la première croisade et des États latins d’Orient (2016), La noblesse des marches, de Bourgogne et d’ailleurs, au temps de Marguerite d’Autriche XVe-XVIe siècle (2017), Jean Germain (v. 1396-1461), évêque de Chalon-sur-Saône, chancelier de l’ordre de la Toison d’or (2019), Miroir du Prince, 1425-1510. La commande artistique des hauts fonctionnaires de la cour de Bourgogne (2021), Relation de la croisade de Nicopolis [XVe siècle], suivie du Memoire du voyage de Hongrie fait par Jean comte de Nevers en l’an 1396, sa prison, sa rançon et son retour en France, par Prosper Bauyn [XVIIe siècle] (2021), Pero Tafur, Aventures et voyages (2022), La noblesse au Moyen-Âge (avec Sarah Fourcade, 2024).
[2] La dynastie Jin a dirigé la Chine du Nord-Est. Elle a été fondée en 1115 par Jin Taizu, le dirigeant du peuple Jürchen, ancêtres des Mandchous, et a pris fin en 1234 par l’invasion des Mongols de Gengis Khan.
[3] Khan ou Qan est un titre signifiant « dirigeant » en mongol et en turc. Le terme est parfois traduit en « souverain » ou « roi ».
[4] Un empire d’Asie centrale au régime très largement sinisé.
[5] Un empire perso-turc qui intégrait les territoires du Khwarezm (Chorasmie), de Transoxiane et de Perse (1077-1231).
[6] La Transoxiane est l’ancien nom d’une partie de l’Asie centrale située au-delà du fleuve Oxus. Elle correspond approximativement à l’Ouzbékistan et au Tadjikistan actuels.
[7] Les limites du Grand Khorassan correspondaient plus ou moins à l’Afghanistan actuel, en incluant des parties de ce qui est aujourd’hui l’est de l’Iran, le Turkménistan, l’Ouzbékistan et le Tadjikistan.
[8] La Rusʹ de Kiev était une principauté slave orientale qui a existé du milieu du IXe au milieu du XIIIe siècle sous la domination des Varègues (Vikings) et des Slaves de Kiev (Polianes), auxquels les Varègues se sont assimilés. Elle s’est finalement fragmentée en une multitude de principautés qui ont ensuite subi, à l’ouest, la conquête lituanienne, et à l’est l’invasion mongole, qui commença en 1223.
[9] Une région qui recouvrait en partie l’Ouzbékistan, le Tadjikistan et l’Afghanistan, englobant les villes historiques de Samarcande et Boukhara ainsi que la vallée irriguée de Zeravchan (la Polytimetos des Grecs).
[10] La Horde d’or était un empire mongol gouverné par la dynastie issue de Djötchi (ca 1182-1227), le fils aîné de Gengis Khan. Aux XIIIe et XIVe siècles, il s’étendait sur une grande partie de l’actuelle Russie, de l’Ukraine, de la Bulgarie danubienne (jusqu’aux portes du Danube), du Kazakhstan, de l’Ouzbékistan, du Turkménistan et du Caucase.